Et voilà, il est arrivé en même temps que le début de l’été : tout beau, tout neuf, tout frais et tout exprès pour enchanter les vacances qui ne vont pas tarder, avec un brin d’humour et beaucoup de bonne humeur… puisqu’il faut bien chasser les nuages que parfois, la vie nous apporte.
Il s’agit du feel good « Demain, tout ira bien ! » : le TOME 2 !
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Ou bien là : Demain, tout ira bien! (bod.fr)
En voici les premiers chapitres :
FEVRIER 2018
JOUR : samedi 10 février
MÉTÉO : zéro degré, quelques flocons de neige…
HUMEUR : heureuse et terrifiée !
Le prêtre s’approche d’Anny et Lorenzo, pose sur le couple un regard bienveillant et poursuit son discours entamé il y a presque une heure :
Je sens un coude qui s’enfonce dans mon bras droit, ma mère murmure :
La robe d’Anny est une création unique, composée d’onéreux tissus rares. C’est Lorenzo qui a dessiné le modèle avant de le faire réaliser par un grand couturier. Les dentelles qui ornent la robe donnent une touche très italienne à l’ensemble, je trouve que c’est beau.
Ce que ma mère peut être conventionnelle ! Je tente de me concentrer sur le moment fatidique : l’échange des anneaux d’or. Pour une fois, tout se passe sans encombre, chaque cercle doré se glissant à merveille à l’annulaire de chacun. Je sens une pression douce sur ma main gauche, je tourne un peu la tête vers Jorzak : nos regards se croisent, se disent des choses pleines d’émotion.
La cérémonie touche à sa fin, ce qui me soulage car même si Lorenzo a réussi l’exploit de faire chauffer au mieux la cathédrale, l’édifice est ancien et immense, et mes pieds commencent à geler. Par bonheur, aucune haie d’honneur n’a été prévue, et nous sortons, petite masse compacte d’invités venus d’un peu partout : on entend des accents italiens chantants, quelques mots d’anglais ou d’américain, et même quelque chose qui ressemble à du slave. Lorsqu’à leur tour, Anny et Lorenzo franchissent le vaste porche de la cathédrale, une pâle lumière dorée illumine leurs visages qui rayonnent. Dans l’air glacial, des pétales de roses et des sourires, des mains qui applaudissent : une vraie fête. Une belle fête.
Nous marchons tous en direction du Grand Hôtel de l’Opéra, que Lorenzo a fait privatiser pour l’occasion. Comme pour ajouter une touche de féerie à ce mariage, des petits flocons blancs commencent à tomber, doux et légers. La place du Capitole ressemble soudain à une boule sous verre que l’on secoue pour faire tourbillonner la neige.
Bien sûr, tout est grandiose à l’Hôtel de l’Opéra ; la décoration a été orchestrée par Lorenzo : aux murs, des masques somptueusement travaillés, tandis que sur les tables, des fleurs et des couverts raffinés invitent à prendre place. Nous nous asseyons autour d’une table ovale, découvrons nos noms et ceux des autres invités gravés à l’or fin sur la porcelaine des assiettes en forme de feuille. Je suis heureuse de connaître du monde à ce mariage, tout comme je l’ai été en recevant l’invitation qui stipulait que « madame Soline Atlan ainsi que son conjoint, Jorge Isaac », étaient conviés à partager ce moment exceptionnel qui allait unir deux âmes sœurs en la Cathédrale Saint-Etienne de Toulouse.
La musique est choisie, tamisée durant le repas composé de mets fins, et entraînante lorsqu’il le faut. Nous dansons, Jorzak et moi, enlacés et heureux. Je me dis que le bonheur est simple, finalement. À table, l’ambiance est bonne puisque s’y trouve Perla, avec qui j’ai renoué une vraie amitié depuis mon déménagement. Et ma sœur est là aussi, ainsi que son mari, pour une fois délestés de Soizic et Maxence :
Mon beau-frère ajoute :
Ces derniers temps, je trouve que Lyza et Pierre-Loïc se disputent souvent, un peu trop… Ils semblent constamment à cran. Mais Jorzak détend l’atmosphère par une pirouette en forme de plaisanterie, et je pense une fois de plus, à quel point j’ai de la chance de l’avoir rencontré.
Il est très tard lorsque les premiers invités commencent à regagner leur chambre. Vers cinq heures du matin, nous décidons d’en faire autant. Dès que j’ouvre la porte, je suis saisie par la beauté des lieux : c’est immense et merveilleusement décoré. Anny a réservé pour nous une véritable suite « parce qu’il n’est pas question que vous retourniez dormir, au milieu de la nuit, dans vos minuscules appartements de la rue Bayard ! », m’a-t-elle dit il y a quelques jours. Nous sommes fatigués, sans doute dans un état légèrement second, à cause du contexte. Jorzak me soulève avec délicatesse et me pose sur l’immense lit moelleux. J’ai l’impression que nous sommes les mariés, ma tête tourne un peu parce qu’avec cette profusion d’excellents vins, j’ai bu quelques bons verres. Jorzak aussi. Il me regarde soudain d’un air grave et profond, je sens qu’il se passe quelque chose. Il s’assoit sur le lit, me dévore des yeux et dit :
Sur le moment, je ne comprends pas et je réponds, la bouche un peu pâteuse :
Son regard est toujours aussi sérieux quand il ajoute :
Je me relève brusquement, tout s’embrouille dans ma tête fatiguée. Je pense que je devrais être la plus heureuse des femmes, et en une sens, je le suis. Mais en même temps, il y a quelque chose qui monte en moi, enserre ma gorge, m’empêche de respirer. C’est une peur proche de la panique. J’ai soudain très chaud, mais je sens des frissons glacés parcourir mon corps. Je réponds très vite :
Jorzak m’entoure de ses bras tièdes et rassurants, murmure :
Et il m’embrasse longuement. Son haleine est teintée d’alcool, je pense à toute vitesse qu’il aura peut-être oublié tout ça dès demain et je lui rends son baiser. J’ai du mal à cerner ce qui se passe en moi : on dirait qu’une partie de moi est joyeuse parce que cette demande en mariage est touchante, c’est un acte d’amour. Pourtant, une autre partie de moi est terrifiée.
Nous nous glissons dans les draps satinés, je pense que demain est un autre jour. Tout y paraîtra plus clair, dans une lumière neuve. Si toutefois je parviens à m’endormir…
JOUR : dimanche 11 février
MÉTÉO : des kilos de neige
HUMEUR : fatiguée
J’ai passé la nuit, ou plutôt ce qu’il en restait, à me triturer le cerveau dans cette magnifique suite du Grand Hôtel de l’Opéra. Affalée sur le canapé du coquet salon attenant à la chambre, le visage enfoncé au milieu des coussins en tissu irisé, j’ai commencé à dresser le bilan de ma petite vie :
Il est à présent presque onze heures, le jour s’est levé depuis longtemps, mais il éclaire la suite d’une lumière blafarde. J’ai dormi par intermittence dans le salon, au rythme des ronflements de Jorzak. Je foule la douce moquette qui assourdit les bruits, vais jusqu’à la fenêtre : dehors, la neige semble ne plus vouloir s’arrêter. J’entrouvre la vitre, la referme aussitôt, le froid a redoublé d’intensité durant la nuit. Je pense que Jorzak ne tardera pas à s’éveiller, que nous devrons quitter ce cocon chaud et douillet, et surtout, qu’il faudra que je lui dise… Mais comment lui dire, comment trouver les bons mots ? Et s’il ne se souvenait de rien ? Au fond, ça réglerait, au moins temporairement, mes douloureux états d’âme. Car je m’en veux, de ne pas l’aimer assez pour l’épouser. Parce qu’il en vaut la peine. Mais épouse-t-on un homme parce qu’il en vaut la peine ?
À midi, je fais un texto à Perla, lui demande si on peut se voir dans la semaine, est-ce qu’elle est disponible ? Si ses enfants sont avec elle cette semaine, je sais d’avance que c’est cuit. J’entends quelques grognements, vois Jorzak qui s’étire en se réveillant, m’approche du lit et l’embrasse doucement. J’ai l’impression d’être hypocrite. Il baille et me sourit :
Je hoche la tête, toujours touchée par ce surnom qu’il m’a donné. Je pense que je ne le mérite pas. Une fichue hypocrite, voilà ce que je suis. Tout le contraire d’une jolie petite fée ! En plus, avec mes yeux cernés et mes cheveux en bataille, j’ai l’impression d’avoir pris quelques années en à peine une nuit. Le fait d’avoir remué les choses, des déceptions et des ruptures, le passé que je voudrais oublier. Au fond, il est encore bien présent.
Nous nous douchons à tour de rôle longuement, histoire de finir de nous réveiller. Nous ne faisons pas l’amour, pas le temps, pas l’envie, pas le moment… Avant de partir, nous profitons du buffet généreux mis à la disposition des invités. C’est drôle parce que les salles sont déjà rangées et nettoyées, pour un peu on douterait qu’un mariage ait été célébré ici durant presque toute la nuit. Nous ne verrons pas Anny et Lorenzo : ils ont quitté Toulouse dans la matinée et doivent se trouver quelque part, entre ciel et terre, pour un long voyage de noces. J’aperçois quelques visages fatigués, mais personne que je connaisse. À vrai dire, nous sommes parmi les derniers à nous attarder.
***
Lorsque nous rentrons rue Bayard, nous passons d’abord chez moi : il faut augmenter le chauffage, arroser deux plantes vertes, poser mon petit sac de voyage. Ensuite, nous montons chez Jorzak qui habite juste au-dessus de chez moi. C’est une habitude que nous avons prise : d’abord chez moi, avant de finir la soirée chez lui. Notre routine finalement, quelque chose qui ronronne comme un chat au coin du feu.
Nous n’avons pas encore faim, bien que la soirée soit déjà entamée. Je regarde mon portable, lis la réponse de Perla : « Ok pour mardi, 17 h, si ça te va, bisous ». Je réponds rapidement, soulagée de pouvoir bientôt parler à quelqu’un qui ne soit pas Jorzak.
Vers vingt heures, Jorzak met de l’eau à bouillir pour cuire des pâtes, jette une poignée de sel dans la casserole pendant que je continue à me demander s’il se souvient de quelque chose, sans oser lui rappeler quoi que ce soit. Je pense qu’il a oublié, commence à me détendre, pose un disque dans le lecteur. Jorzak tourne les spaghettis avec une spatule en bois, il sifflote, s’arrête un moment et me dit :
Je sursaute, suppose qu’il s’agit de sa demande en mariage, marmonne un vague « oui ». Il reprend :
Je râcle ma gorge, j’ajoute :
Son ton monte un peu :
Je n’en reviens pas qu’on ait une conversation pareille. L’impression qu’on se trouve au bord d’un conflit alors que rien ne devrait être plus joyeux et romantique qu’une demande en mariage. Mais ça ne l’est pas, et cette discussion me donne le sentiment d’étouffer. Je prétexte un article à rédiger, le besoin de me trouver au calme, dans mon appartement. Je sais que Jorzak n’est pas dupe :
Nous mangeons presque en silence, sans hostilité mais sans complicité. Je touille mes pâtes, ajoute du fromage râpé, porte la fourchette à ma bouche, mastique péniblement. Jorzak parle de son projet, l’ouverture de sa seconde boutique. Sa voix est monocorde, il parle sans conviction. Je réponds avec politesse, en faisant attention à mes mots, sans enthousiasme. Je suis consciente que nous sommes tous deux épuisés, mais il ne s’agit pas que de ça. On dirait que quelque chose s’est cassé, à peine une fêlure mais suffisante à rendre le vase perméable…
Je vous souhaite une très belle lecture, un été ensoleillé, du sable chaud sur les pages et que des belles choses !
Zalma-Solange Schneider