« Manu la tigresse », un thriller burlesque signé Solange Schneider, pseudo. Zalma. Est-ce qu’on s’est envoyés en l’air, au moins ? … Dyeux seul le sait…
Manu la tigresse
L’impact des gouttes sur le métal. L’air saturé d’électricité. Une nuit sans fin, enfermé dans cette caisse métallique, une nuit entière à me demander ce que je fous là. Impossible d’accrocher une bribe de souvenir, à l’exception de Manu : ses beaux yeux de tigresse plantés dans les miens, sur fond de musique douce, et puis soudain, plus rien. Le noir total. Je prie Dyeux de me sortir de là, et pourtant Dyeux sait si je ne suis pas croyant… oui, Dyeux… c’est comme ça que je l’appelle depuis que je suis gosse, mais seulement quand j’ai un gros problème. Et là, je crois que j’en ai vraiment un.
C’est pire que quand ma première femme m’avait quitté, car là je respire mal et mes mains sont liées. Voilà, j’ai les mains attachées derrière le dos et je suis prisonnier de cette maudite boîte en métal, enferré dans la ferraille. Le pire, c’est de ne même pas savoir pourquoi. Seul Dyeux le sait… enfin, il doit bien le savoir…
En attendant qu’il sache, je me concentre sur l’unique détail qui me reste en mémoire : les yeux de Manu, donc… ah oui, je me souviens de ça aussi : un corps de déesse. Voilà : Manu, un corps de déesse et des yeux de tigresse, mais je ne sais pas qui est Manu, je me souviens juste de son prénom, et de ses fesses ; voilà, ça me revient : deux pêches géantes rebondies à souhaits. Est-ce qu’on s’est envoyés en l’air, au moins ? M’en rappelle pas… Dyeux seul le sait…
Depuis le temps que je pêche des filles dans les bars et tous les lieux glauques de chaque ville où je passe, ça allait bien finir par arriver : un coup tordu, une jolie saloperie déguisée en fée qui m’aura piqué tout mon blé, et enfermé dans le coffre de ma propre voiture… Parce que c’est ma voiture, j’en reconnais l’odeur, mêlée à celle de ma peur, autant dire que ça pue…
Il pleut. J’entends l’impact des gouttes sur le métal. J’ai de plus en plus froid, je ne peux même pas crier pour qu’on me sorte de là, cette belle salope m’a bâillonné : pieds et poings liés comme un saucisson, un chiffon nauséabond enfoncé dans ma bouche, je respire par le nez… Bon Dyeux, si seulement je me souvenais de ce qui s’est passé !
D’un seul coup, je pense à Nadine : Nadine, c’est ma régulière, second mariage, deuxième chance : une superbe bonne-femme qui fait bien la cuisine et le reste, des trucs qui se refusent pas comme une cerise sur le gâteau, et deux mômes en prime. Voilà, je sais que j’ai deux mômes, alors qu’est-ce que je foutais avec Manu la Tigresse, hier soir ? Enfin, je dis hier soir mais j’en sais rien…
J’ai une faim à bouffer du cheval cru, une soif de fou, et j’entends l’eau, ces putains de gouttes d’eau qui heurtent le métal, et moi enfermé, ligoté comme un con à l’intérieur de ce fichu caisson… Donc, au vu de ma soif, je dirais que je suis là depuis au moins 24 heures, peut-être même 48 heures, sans savoir s’il fait jour ou nuit dehors, et je m’en fous.
Je veux boire, ça vire à l’obsession… Si seulement Nadine pouvait m’apporter une cruche de flotte, une magnifique cruche géante remplie à ras-bord. Des fois, je pense qu’elle a jamais rien su de mes histoires avec toutes ces catins rencontrées dans les bas-fonds des villes… mais c’est pas sûr… à cause de « l’instinct féminin » comme on dit… le sixième sens des femmes…
Dyeux seul le sait… comme deux yeux qui verraient tout, qui sauraient tout…
Je m’endors et me réveille en sursaut, je dirais toutes les heures, mais je perds la notion du temps. J’ai viré le chiffon encastré dans ma bouche, ça c’est fait… mais je peux toujours pas bouger : j’essaye de me libérer, et plus je me tortille dans tous les sens, plus les nœuds se resserrent… J’ai quand même pas baisé avec un type de la marine qui m’aurait ligoté comme ça… même si je perds la boule quand je picole, j’ai quand même pas fait ça…
J’ai pas la trouille qu’on me trouve pas : une caisse abandonnée, ça se remarque, tout de même ! Mais au bout de combien de temps ? Voilà, c’est ça qui m’inquiète le plus… J’ai le temps de crever de soif… c’est ça, ma trouille. J’en ai les poils qui se dressent sur les bras, sur tout le corps d’ailleurs. En plus de ça, ils m’ont foutu à poil. Ils ou elle, je ne sais toujours pas : Manu la Tigresse et son copain le marin, le salaud qui fait des nœuds à rendre fou.
Je sens un truc humide sur mon front… c’est bizarre, on dirait qu’une goutte d’eau vient de s’y écraser. Le coffre de ma bagnole a peut-être un trou, juste ce qu’il faut pour laisser passer un peu d’eau, pour que je crève pas de soif, et je remercie Dyeux, même si ça va être dur de boire au compte-gouttes… faut juste que j’arrive à bouger ma tête, la faire glisser au bon endroit pour que les gouttes tombent pile poil dans ma bouche, que je clamse pas de soif en attendant qu’ils me retrouvent. Ce sera déjà ça de gagné… !
Les salauds ! Je peux pas bouger
Les salauds ! Je peux pas bouger : ils m’ont vissé le crâne dans une espèce d’étui fixé quelque part, j’en sais rien, je vois rien. Je croyais juste que ma tête était lourde, à cause du choc sur mon crâne quand ils m’ont assommé, mais c’est pas ça : ils l’ont immobilisée, et cette foutue pluie continue de goutter, pile au milieu de mon front, pendant que je claque de soif.
Je sais que l’impact des gouttes qui s’écrasent une à une sur mon front, l’impact va me rendre fou… Pourvu qu’ils me trouvent à temps… avant que je ne devienne cinglé ou que je crève de soif… Ça tape… tape… tape…
Je prie plus Dyeux, j’ai plus la force… ça tape depuis des heures, des jours entiers ça va continuer si cette pluie n’arrête pas… J’entends des pas qui se rapprochent ; quelqu’un introduit une clé dans la serrure du coffre et soulève le couvercle, et je sauterais de joie si je n’étais pas saucissonné comme ça. La lumière est trop forte, on dirait une torche, je sais pas… j’ai mal aux yeux, je vois rien. J’entends une voix que je connais, et je pense à la cruche qu’elle va m’apporter, mais c’est pas pour ça qu’elle est venue… non, non, c’est pas pour ça…
Elle murmure distinctement : « Je dirai aux gosses que t’es coincé à cause des embouteillages… que tu rentreras pas… comme d’habitude… ». Et puis, par-dessus la voix de Nadine, éclate comme un orage dément le rire de Manu la Tigresse. Bon Dyeux, ça m’aura coûté cher d’avoir touché ses fesses…
Je sais pas comment elle l’a su, Nadine, et je saurai sûrement jamais… Dyeux seul le sait… Saloperie d’ « instinct féminin » !
Un claquement sec : le coffre se referme. Je commence à geler, le cerveau en bouillie et le corps en charpie, la gorge asséchée. J’ai de plus en plus soif… soif à en devenir fou… Pas de lumière au bout de la nuit… Juste l’impact des gouttes. Sur le métal et sur mon front. À intervalles réguliers. Ça tape… tape… tape…
Solange Schneider, thriller burlesque
18 commentaires
Hello Bernie
Depuis que je suis petit, ce n’est ni dyeux et ni manu que j’appelle ma déesse « la Belle de Milwaukee » mais Harley Davidson »…. Oh bien sur, elle couche pas dans mon lit, elle reste seule dans un beau garage feutré mais elle me procure beaucoup de sensations…..quand on connait cette déesse, elle vous mene à l’extase…contrairement à Dyeux !
Bon Vendredi
@+ Pat
J’ai un ancien collègue qui lui avait fait place dans son salon…
Une belle punition pour un coureur … de jupons … ou autres.
Mais tellement improbable.
Bon samedi avec des bisoux cher bernie.
Va savoir…
le titre annonce la suite, et la vengeance est un plat qui se mange froid
Et Nadine a le temps…
Il semble que Nadine soit de ces femmes à la rancune tenace….
Bonne journée
il me semble aussi…
Thriller burlesque ? Un rire sadique alors !
Tu trouves ?
Il aurait dû attendre une invitation…
L’aurait-elle invité ?…
ça fonctionne aussi avec Maud
ça ne m’étonne pas de toi…
je pense que oui
moi aussi…
Salut
Le temps est variable avec quelques éclaircies de temps en temps.
Il parait que cela va s’arranger à partir de jeudi.
J’espère qu’il fera beau pour le carnaval dimanche.
Bonne semaine
Croisons les doigts, j’espère qu’il fera beau.