Le Prix de la littérature arabe 2020 créé par l’Institut du monde arabe et la Fondation Jean-Luc Lagardère, est décerné à l’écrivain soudanais Abdelaziz Baraka Sakin pour son roman Les Jango (Éditions Zulma), traduit de l’arabe (Soudan) par Xavier Luffin.
Une mention spéciale est attribuée à l’écrivaine libanaise Dima Abdallah pour son roman Mauvaises herbes (Sabine Wespieser).
Abdelaziz Baraka Sakin lauréat du Prix de la littérature arabe 2020
Le jury de cette 8e édition, co-présidé par Pierre Leroy, cogérant de Lagardère SCA et Alexandre Najjar, écrivain et responsable de L’Orient littéraire et composé de personnalités du monde des arts et de la culture ainsi que de spécialistes du monde arabe, a salué « un roman surprenant de verve et de force politique où l’auteur mêle avec bonheur le fantastique et l’humour dans une intrigue très habilement construite ».
Le jury a également tenu à souligner l’excellente traduction du livre par Xavier Luffin.
Quant au roman de Dima Abdallah, le jury a souhaité récompenser « un premier roman émouvant, fort bien écrit, qui raconte l’histoire d’une double perte : celle d’un pays et celle d’un père ».
Jack Lang, président de l’IMA, souligne la grande qualité du livre primé, Les Jango d’Abdelaziz Baraka Sakin : le sens de l’humour et du fantastique de l’auteur, même au coeur de la noirceur, rejoint la grande aventure humaine et universelle.
Abdelaziz Baraka Sakin, lauréat du Prix de la littérature arabe
Abdelaziz Baraka Sakin succède à l’égyptien Mohammed Abdelnabi qui avait reçu le Prix de la littérature arabe en 2019 pour son roman La Chambre de l’araignée (Actes Sud /Sindbad), traduit de l’arabe par Gilles Gauthier.
Abdelaziz Baraka Sakin et Dima Abdallah seront les invités d’honneur de deux rencontres littéraires spéciales à l’Institut du monde arabe, les 5 décembre 2020 et 27 février 2021.
Ce prix prestigieux que des écrivains importants comme Jabbour Douaihy ou Sinan Anton ont reçu avant moi, constitue sans aucun doute le couronnement de mon roman, « Les Jango».
Je pense que ce prix est arrivé juste au bon moment, puisque mon roman parle de tolérance religieuse, d’amour et d’humanité, alors que nous vivons maintenant dans un monde déchiré par de violentes luttes identitaires, traversant ce qui ressemble à un choc des civilisations.
Le prix constitue aussi un soutien moral et matériel dans mon combat d’un exil à un autre.
Abdelaziz Baraka Sakin est né en 1963 au Soudan.
Après Le Messie du Darfour (Prix Littérature – Monde 2017), il revient avec Les Jango (d’abord paru en 2009 au Soudan où il fût immédiatement retiré de la vente et brûlé lors d’autodafés, puis en France en 2020).
L’auteur, adulé dans le monde arabe, vit depuis en exil (il réside aujourd’hui à Montpellier).
Les Jango
Les Jango sont décidément impayables. On les reconnaît à leur élégance tape-à-l’oeil et à leur sens de la fête. Et ce sont les femmes qui mènent la danse, dans la Maison de la Mère, au coeur de toutes les rumeurs.
Les histoires les plus folles courent d’ailleurs sur Safia, élevée au lait de hyène, Alam Gishi l’Éthiopienne experte en amour, ou l’inénarrable Wad Amouna.
Lorsque soudain souffle le vent de la révolte… Dans les effluves de café grillé, de chicha parfumée et de gomme arabique, se joue une comédie humaine dont les Jango, « sages à la saison sèche et fous à la saison des pluies » sont les héros.
Dima Abdallah, mention spéciale du jury
Née au Liban en 1977, Dima Abdallah vit à Paris.
Après des études d’archéologie, elle s‘est spécialisée dans l’antiquité tardive. Mauvaises Herbes est son premier roman.
Ce roman, qui a pour décor de fond la guerre civile libanaise et l’exil, porte en lui, je l’espère, un message plus universel qui est celui de l’exil intérieur et de la difficulté à trouver sa place dans un monde violent. […]
La violence est partout autour de nous et la littérature est là pour la dire mais aussi pour l’exorciser. Le geste créatif, quel qu’il soit, reste une forme de résistance, de révolte et donc d’espoir.
Mauvaises Herbes
Ne pas se plaindre, cacher sa peur, quitter à la hâte un appartement pour un autre, l’enfant née
à Beyrouth pendant la guerre civile s’y est tôt habituée. Son père, « son géant », sait combien, dans cette ville détruite, son pouvoir n’a rien de démesuré.
Même s’il essaie de donner le change avec ses blagues, cet intellectuel – qui a le tort de n’être d’aucune faction ni d’aucun parti – n’a à offrir que son angoisse, sa lucidité et son silence.
L’année des douze ans de sa fille, la famille s’exile sans lui à Paris. Collégienne brillante, jeune femme en rupture de ban, mère à son tour, elle non plus ne se sentira jamais d’aucun groupe, et continuera de se réfugier auprès des arbres et de ses chères adventices, ces mauvaises herbes qu’elle se garde bien d’arracher.