Quelque part, entre la Saint-Valentin et la journée de la femme à venir, début mars, voici un extrait d'une nouvelle consacrée au mariage… une histoire qui se raconte, entre le tulle blanc et les fleurs…
Ce jour-là…
Claire regardait cette femme surgie d’un autre temps, ses yeux délavés, d’un bleu un peu brouillé. Quelque chose suspendu entre les mots et dans ses gestes lents, quelque chose l’habitait.
La femme lui avait dit : « Asseyez-vous, je vous en prie… », et Claire avait posé le grand sac élégant décoré d’un ruban bleu, qui contenait le tulle blanc et la fragile étoffe irisée, couleur d’ivoire et ornée de perles. Puis, elle s’était assise presque docilement.
Elle sentait le regard de la femme posé sur elle, tandis qu’elle buvait le thé parfumé à petites gorgées. Son fin visage encadré de cheveux blancs remuait imperceptiblement, ses lèvres décolorées murmuraient : « Vous allez vous marier, Claire… n’est-ce pas ? » Claire prononça un léger « oui ». Il y eut un long silence, la femme hocha la tête et se mit à parler : « Je portais une robe blanche, ce jour-là… elles en portent toutes, je n’ai pas dérogé.
(…)
Ce jour-là, donc, j’imaginais l’aube d’une existence qui déroulerait un fil paisible. Nous ne prétendions pas au bonheur, ce n’était pas comme aujourd’hui où les jeunes gens sont pétris de rêves…
Je connaissais les charges qui incombaient aux femmes, ça ne m’effrayait pas. J’entendais couler ma vie dans le courant qui m’avait précédée, celui-là qui me verrait survivre et puis m’éteindre un soir, dans la quiétude du devoir accompli. Cela vous choque peut-être, oui, sans doute.
Enfin, c’était ainsi. Nous étions façonnées, sûrement ne l’êtes-vous plus autant mais nos histoires sont si semblables au fond… nos noces, tout ce monde, ces discours et ces fleurs : il y en avait partout, un débordement de couleurs et de feuilles vertes, une exubérance, et moi, debout, droite, enveloppée de soie et de tulle blancs. Je ne pensais pas vaciller ni chavirer. J’avais des certitudes, je les prenais pour des fondements, une sorte de foi en ce que je croyais, mes évidences. Je n’aspirais qu’à l’ordinaire, celui de nos mères avant nous, Claire. Je n’avais pas appris à douter.
***
Et puis il y eut le premier soir, la première nuit, le lit trop grand et cet homme que j’indisposais. Il y eut le premier matin, la chambre froide, nos premiers mots d’époux, des mots teintés de politesse.
Ensuite, la vie s’est égrenée telle que je l’avais voulue, dans ses langueurs et ses monotonies, auprès de cet homme dont les silences peu à peu me glaçaient. N’y eut-il eu les convenances, eussions-nous seulement échangé paroles ? Nous restions distants, courtois, n’entretenant qu’un commerce nécessaire. J’avais également fini par me taire, jusqu’à ce matin de février… Il y avait ces douleurs lancinantes qui ne me quittaient pas depuis des mois, d’intenses céphalées qui usaient ma patience et ma raison.
Je n’avais pas médité mon acte, simplement, ce matin-là, j’ai senti mon esprit se fêler comme un vase trop rempli, un vase au goulot si étroit que ne pouvait s’échapper ce qu’on y avait déposé…
Une nouvelle signée Solange Schneider pseudo Zalma écrivain, auteur de « Chemins étranges » et « Points de fuite »
4 commentaires
c’est super un lit king size avec les miroir au plafond mlle Solange hi hi hi
Pat tu es incorrigible.
ça va mal finir
peut-être…