Tous les mercredis, Yves Carchon, écrivain, nous ouvre son univers littéraire, en nous offrant le plaisir de la lecture d'une nouvelle ou d'une micro-fiction.
Le chocolat
Te souviens-tu de ce moment où nous nous sommes retrouvés, après deux ans sans nous parler ?
— Non, c’est le blanc total !
— Voyons, rappelle-toi ! Le silence devait être bien lourd ou peut-être trop léger pour l’avoir à ce point oublié !
— En effet ! Mais maintenant, ça me revient ! Ce fameux jour où l’on a renoué après deux ans d’errance passés chacun de son côté…
Ce jour-là, tu portais une robe chamarrée….
Et nous n’avions même pas fumé un joint, tant nous étions surpris de nous revoir !
— Ma robe était si longue, je ressemblais, tu sais, à une aquarelle de Marie Laurencin…Comme dans cette fameuse chanson !
— Tout juste ! On ne peut dire non plus qu’on était franchement causants à cette époque ! Il est vrai aussi que parler était superflu entre nous ! Les mots, on en avait soupé ! Seuls nos regards comptaient ! C’est toi qui m’en avais parlé un jour…
— Non, non, c’est toi qui ne voulais plus rien entendre, les mots étaient du bruit pour toi !
— Peut-être ! En tout cas, ce dont je me souviens, c’est que tu adorais les petits pains au chocolat, l'été indien, toutes ces chansons qui parlaient de romance… Le chocolat, bien sûr ! Tu adorais le chocolat !
— Tu te souviens du chocolat ?
— Bien sûr ! Sais-tu qu’on peut en boire ici ?
— Ah, oui ?
— Si, si ! Mais autant te le dire : il n’est pas des meilleurs ! C’est un peu comme dans ces maisons de retraite…
— Ne me dis pas…
— Si ! Tu verras : tout ce que tu manges ici n’a aucun goût ! Et tu ne sens plus rien, non plus ! Tu ne perçois aucune douleur, ni n’éprouve plus le moindre sentiment…Ne cherche pas non plus à me prendre la main, tu te heurterais à du vide !
— Attends ! Je crois avoir compris !
— N’en dis pas plus ! Parle-moi plutôt du temps où tu buvais ce chocolat ô combien bon et odorant que tu adorais tant !
Une micro-fiction signée Yves Carchon, écrivain, auteur de "Riquet m'a tuer", de "Vieux démons", de « Le Dali noir », et de son dernier polar « Le sanctuaire des destins oubliés »
8 commentaires
un body chocolat, ce n’est pas mal non plus……
ça se savoure…
Difficile de réveiller le passé
C’est souvent compliqué
retrouvaille dans l’au-delà? Bonne journée
peut-être…
Il est des souvenirs qu’il est bon d’évoquer mais je me demande si dans cette dimension on les retrouve intacts .
je me le demande aussi