En ce 8 mars, qui est symbolique, puisque « journée de la femme », je vous présente Emilie Goudin-Lopez : une auteure au parcours étonnant, puisqu’elle écrit aussi bien pour la jeunesse que pour les adultes, passant avec brio de la romance classique à la romance historique…
Et qui sait quelles autres surprises nous réserve Emilie ?
Interview d’Emilie Goudin-Lopez
1°) Bonjour Emilie ! Votre dernier livre, « Quand brûle le monde », le second tome d’une romance historique, vient de paraître chez City-éditions. Voulez-vous nous en parler un peu… ?
Bonjour !
Il est effectivement en deux tomes, d’environ 400 pages chacun : le premier commence à la fin du printemps 1943, lorsqu’Irène, une institutrice qui a bien compris que pour éviter les ennuis il suffit de baisser la tête, se voit confier la fille de son voisin, noir, qui est traqué par la gestapo. La petite a 8 ans, et il faut la cacher. Irène prend contact, difficilement, avec le réseau de résistance locale, pour mettre l’enfant à l’abri.
À partir de là, le meneur des partisans va lui confier des missions qu’elle ne pourra pas refuser. Le tome deux couvre l’année 44, le débarquement et la libération. Le vent tourne, les nazis sont acculés.
C’est une œuvre historique, romanesque, et tumultueuse. On dépasse le cadre de la romance. Je voulais raconter l’histoire contrariée d’un couple interdit – ici une résistante débutante et l’officier allemand qu’elle a pour mission d’espionner- mais aussi, surtout, jouer avec la boussole morale des personnages… et des lecteurs et lectrices. Ces trafiquants qui font du marché noir, alliés ou ennemis ? Cette femme qui fait du commerce avec les nazis pour nourrir sa famille, collabo ou patriote ?
2°) Pourquoi avoir choisi ce contexte, qu’est-ce qui vous a inspirée en particulier et qu’est-ce qui vous inspire en général ?
Ce thème-là n’est pas très original : l’Histoire et la fiction regorgent de récits similaires : suite française, le silence de la mer… Je ressens un frisson à l’évocation des femmes tondues, jetées en pâture à la foule, lors de la libération. C’est un acte de vindicte populaire, misogyne, souvent gratuit, qui s’est reproduit partout en France à plusieurs occasions à la fin de la guerre : une première fois à la libération, souvent août ou septembre 44 ; et une seconde fois lors de la capitulation du Reich, en mai 45.
Par l’écriture, j’aime aller taquiner la boussole morale de mes lecteurs et lectrices, un peu comme on le ferait lors d’une joute verbale philosophique : la fin justifie-t-elle les moyens ? L’intérêt commun est-il supérieur à l’intérêt individuel ? Ce genre de problématique. J’aime écrire des fictions qui vont pousser celles et ceux qui me lisent à se poser ces questions.
J’aime aussi parler des femmes. Elles sont au cœur de chacun de mes romans, qu’ils soient jeunesse, historique ou érotiques. Elles sont diverses, multiples, fortes ou fragiles, blanches ou noires, françaises ou étrangères, jeunes ou âgées, ouvrières ou bourgeoises, résistantes ou collabo, engagées ou passives, mariées ou célibataires, artistes ou ingénieures… J’aime qu’elles occupent l’espace, et j’aime la notion d’amitié féminine, si présente dans nos vies et si discrète en fiction, où elles sont plus souvent rivales que complices. Je ne sais pas si mes livres s’adressent à un public spécifiquement féminin (pourquoi le seraient-ils ? Une expérience d’écrivaine est-elle par défaut moins universelle qu’une expérience d’écrivain ?), mais il met en scène de nombreuses femmes, qui je l’espère, sauront toucher les lecteurs et lectrices.
3°) Votre parcours d’auteure a commencé bien avant, puisque vous êtes autrice et illustratrice pour la jeunesse (« J’aime Lire : Le Club des As »)… Depuis, vous avez écrit de la romance, « Sous ses doigts », 3 tomes, parus aux Editions « So Romance », et même des nouvelles érotiques.
Comment passe-t-on de l’un à l’autre ? Comment jongle-t-on entre ces univers si différents ?
Mes romans jeunesse pour « J’Aime Lire » ont été mes premiers. J’écrivais déjà ; ma maman et mes amies me disaient que j’étais douée. C’était sympa mais manquait d’objectivité. Alors j’ai décidé d’écrire un texte court et de l’adresser à Bayard Presse, qui donne un retour détaillé aux auteurs. « J’aime Lire », c’est plus de 500 manuscrits reçus tous les ans pour seulement 12 élus (un par mois). Et j’ai été prise, du premier coup ! La chance du débutant ? J’en ai écrit un deuxième, qui a directement été accepté aussi. Peut-être que ma maman avait raison, alors !
J’ai donc décidé de tenter d’écrire quelque chose de plus long, faisant pour l’occasion mes armes à l’occasion d’un concours de romance organisé sur une plateforme en ligne. Je n’ai pas gagné, mais j’ai tenu le rythme, respecté les délais, et écrit un premier roman, qui a été ensuite édité chez &H, la collection numérique des éditions Harlequin. Ensuite, j’étais lancée… La romance, c’est facile : intrigue simple, contemporaine. J’en ai écrit plusieurs. Quant aux nouvelles… C’est une façon de procrastiner : quand je bloque sur un roman, j’écris une nouvelle sexy en quelques pages ! C’est un exercice facile et sans enjeux. À force, j’en avais une dizaine, et voilà comment je me suis retrouvée avec un recueil.
4°) Vous avez voyagé et vécu en Californie, au Mexique et en Belgique… Est-ce que cela influence votre plume ? Je pense notamment à « Rock My Love » (chez &H Editions) une romance qui est aussi un road trip ?
J’ai du mal à écrire sur ce que je ne connais pas. Comment imaginer l’odeur et le bruit des rues de Buenos Aires si on n’y a jamais été ? J’ai eu la chance de vivre à l’étranger, particulièrement aux Etats-Unis, et c’est vrai que ça a donné un cadre tout prêt pour ce roman qui devait mettre en scène un road-trip qui se transforme en traque. L’itinéraire de mon héroïne, je l’ai parcouru, et j’ai pris des notes et des photos. Les odeurs et les lumières sont donc authentiques, promis, j’y étais !
On retrouve ainsi ma vie de dessinatrice dans « sous ses doigts » où mon personnage vit à Bruxelles, dans mon appartement d’étudiante. Même quartier, mêmes ambiances… Sa famille vit en Haute-Savoie, comme la mienne (en Savoie plus exactement, mais les Alpes sont les mêmes) ! Je connais bien San Francisco, qu’on retrouve dans deux de mes livres. En fait, je place mes personnages dans mon cadre de vie, ça me permet d’être plus authentique, plus proche de l’expérience réelle.
5°) Et pour la fin, voici quelques questions afin de mieux vous connaître, et aussi, parce que c’est amusant !
– Emilie, si vous étiez un animal dans un road trip, vous seriez… ?
Un animal dans un road-trip ? C’est une drôle de question… Disons Boulette, la chienne de Wendy, dans « Rock My Love » ? (C’est le seul « animal dans un road trip » qui me vienne à l’esprit !)
- Vous préférez le jour ou la nuit ?
Le jour, parce que j’adore dormir (grand plaisir de la vie) … Mais je me retrouve souvent à écrire de nuit (parce que j’ai des enfants…)
- Quel est le livre qui vous a le plus marquée ?
« Pyongyang » de Guy Delisle. C’est un roman graphique qui se déroule en Corée du Nord en 1994. J’y pense tout le temps depuis que je l’ai découvert, en 1998. C’est une BD absolument fascinante. Terrifiante aussi. Depuis, j’en parle à plein de monde, je l’offre autour de moi et je lis plein de choses sur la Corée du Nord et ceux qui s’en échappent. (Je sais que cette réponse est étrange, mais ce livre m’a vraiment marquée.)
- Et celui que vous avez détesté ?
« Ravage », de Barjavel. J’ai rarement, de ma vie, lu un tel ramassis de poncifs patriarcaux et misogynes. J’ai été écœurée, alors que Barjavel a pour réputation d’être un des grands auteurs français. Depuis, je n’ai plus osé rien lire de lui. On me dit que je devrais tenter d’autre œuvres, que toutes ne sont pas aussi sexistes. Je reste encore frileuse.
- Si vous étiez une fleur maléfique dans une romance, vous seriez… ?
C’est quoi, une fleur maléfique ? Disons euh, l’armoise, distillée en absinthe, l’alcool qui rend créatif (et fou). Romantique… et empoisonné ! Le 19ème siècle, Baudelaire, Toulouse-Lautrec, Montmartre, Ewan Mac Gregor ! (Comment ça, je n’ai pas compris la question ?)
- Et un mot, juste un seul… : celui qui vous vient à l’esprit, pour clore ce petit questionnaire… ?
Pachyderme
Un interview signé Solange Schneider pseudo Zalma écrivain, auteure de « Chemins étranges », « Points de fuite », et « Demain, tout ira bien ! » et « Ma vie en rouge et noir »
6 commentaires
Deux fois 400 pages , j’en ai pour 2 ans ….
il faut que tu progresses
Coco Chanel avait bien reçue la légion d’ honneur !
exact
journée du droit de la femme mais, il est encore bien bien bafoué! Merci pour la présentation.
c’est juste