Après un an de chômage, Matthieu Guigo a poussé la porte d’une boîte d’intérim. Il en est ressorti avec un tee-shirt promotionnel et un voyage pour l’enfer ; un enfer (à ne pas prendre au premier degré !), sis en Vendée, qui n’est autre qu’un abattoir pour gallinacés.
Le travail, oui mais…
En moins de quarante pages, Matthieu Guigo ne propose pas un portrait de cette Vendée conservatrice (qui m’a vu naître… et la fuir !), avec son capitalisme familial, cette terre de peu de chômage et de bas salaires, où la misère est présente, mais discrète, car rurale et si loin des attentions médiatiques.
Il ne décrit pas en détail, tel un ergonome, les postes de travail et les façons de travailler, ni n’en appelle à la révolte contre l’ordre usinier.
« Le travail, oui mais… » est une chronique.
Celle d’un homme plongé dans un univers inédit pour lui, et qu’il découvre avec un regard parfois (faussement) candide, et avec tout son corps.
Car le corps souffre, une fois qu’il est avalé par le « ventre froid de [cette] baleine gigantesque » où règnent le bruit et le métal, une fois qu’il est soumis à la chaîne et à ses cadences, chargé de remplir les barquettes de « matière » sans barguigner.
La volaille n’est plus volaille : la main du prolétaire aux ordres l’a transformée en matière, de la même manière que l’ordre usinier, déshumanisant, a fait de l’être humain un facteur de production qui n’attend du labeur aucune satisfaction autre que le salaire et, en bout de chaîne, une pension de retraite.
Et Dieu qu’elles sont longues ces heures du lundi quand on sait qu’il faudra tenir la semaine. Matthieu Guigo éprouve alors « la fatigue du temps qui ne passe pas », cet « ennui difficile à vaincre ». Et dire que certains sont là depuis tant et tant d’années.
Le 24 décembre, l’auteur a quitté l’enfer. La boîte d’intérim lui avait offert un tee-shirt en guise de bienvenue, l’entreprise lui a offert de la « matière » à rôtir avant le 26, DLC oblige. Joyeux noël…
Matthieu Guigo, l’auteur
Matthieu Guigo est titulaire d'une maîtrise de Lettres Modernes à l'université Rennes II. À la fois humain autodidacte, il livre une pensée sur la vie et une réflexion profonde quant à la dignité de l’être humain dans notre société.
Matthieu Guigo a également publié :
Mutation, le 11 janvier 2016, un changement de carrière pour le flic rebelle, Garrec ? Une mutation ? Un retour aux sources plutôt. Brest. Recouvrance, la pluie, l'amitié et… quelques crimes.
Prolégomènes suivi de Poèmes, le 24 août 2020, Un opus philosophique et poétique qui trouve sa cohérence dans la recherche d'une po-éthique, ; car la poésie et l'art en général ont – malgré leurs spécificités – à voir avec la politique, la pensée et le fil des jours, c'est-à-dire en deux mots : nos vies.
Bocage, le 11 juillet 2022, Bocage est un lieu de rencontre, de ressourcement. Avec soi-même d'abord, sans-doute, pour aller vers l'autre, l'inconnu. La terre est humble ; elle oblige à la sincérité et à travers les saisons, avec lucidité, elle embrasse toute la vie. La nature nous entoure et nous aide, car une année est difficile. Vaincre le temps, le vent, la peur. Se tenir debout et avancer !