Le poison… une arme discrète, insaisissable, et pourtant redoutable. À travers les siècles, certaines femmes ont choisi ce moyen silencieux pour se libérer d’un carcan oppressant. Mais étaient-elles de froides assassines ou les victimes d’un système implacable ? Gérard Morel, dans Ces femmes qui tuent, explore ces destins aussi fascinants que controversés. De l’impératrice Agrippine à Marie Besnard, il nous entraîne dans les méandres de l’Histoire, entre complots, injustices et actes de survie. Entre légende et réalité, ces femmes défient le temps et nous invitent à une réflexion troublante : jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour survivre ? »
Quand le poison devient une arme de survie
Depuis l’Antiquité, certaines femmes ont trouvé dans le poison un moyen de reprendre le contrôle de leur destin. Gérard Morel, magistrat passionné d’histoire judiciaire, explore ce thème complexe dans Ces femmes qui tuent, un ouvrage captivant qui dresse le portrait de treize femmes accusées d’empoisonnement. Vous y découvrirez des figures à la fois fascinantes et inquiétantes, souvent diabolisées, parfois victimes d’un système patriarcal implacable.
Ces femmes n’ont pas toutes tué, mais elles ont toutes été accusées. Et surtout, elles ont toutes marqué l’imaginaire collectif par l’arme qu’elles auraient choisie : le poison. Mais pourquoi ce mode opératoire est-il si étroitement associé à la figure féminine ? Et que révèle-t-il, en réalité, sur la place des femmes dans l’Histoire ?
Le poison : un crime « féminin » par excellence
Historiquement, l’empoisonnement est considéré comme l’un des crimes les plus lâches, car il implique préméditation, dissimulation et traîtrise. Contrairement au duel ou au meurtre passionnel, il ne laisse aucune place à la confrontation directe.
Gérard Morel rappelle dans son livre que le poison est, depuis toujours, perçu comme une arme féminine. Pourquoi ? Parce que les femmes, longtemps exclues des sphères de pouvoir et de la violence légitime, n’avaient que peu de moyens d’action. L’empoisonnement, discret et insaisissable, devenait alors une issue possible, sinon une solution de dernier recours.
Quand la justice confond poison et sorcellerie
Il n’y a qu’un pas entre l’empoisonneuse et la sorcière, et les tribunaux de toutes les époques l’ont franchi sans hésiter. Dans l’imaginaire collectif, le poison est associé à des substances mystérieuses, romanesques, souvent inoffensives — comme la bave de crapaud ou le sang de colombe — mais que l’on retrouve dans les vieux grimoires et les procès de sorcellerie.
Ainsi, les empoisonneuses ont longtemps été perçues comme des figures diaboliques, entre réalité et fantasme. Même les femmes accusées à tort n’ont pas échappé à ce traitement : elles étaient jugées autant pour leurs actes que pour leur genre.
Treize portraits de femmes au destin brisé… ou libéré
Dans Ces femmes qui tuent, vous ferez la connaissance de treize femmes que l’Histoire a retenues sous le signe de la mort. Parmi elles :
- Agrippine, mère de Néron, accusée d’avoir empoisonné pour assurer la montée au pouvoir de son fils.
- La Voisin, célèbre empoisonneuse du XVIIe siècle, impliquée dans l’affaire des poisons à la cour de Louis XIV.
- La marquise de Brinvilliers, exécutée en 1676, devenue une figure emblématique de la femme meurtrière.
- Marie Besnard, surnommée « la bonne dame de Loudun », dont le procès dans les années 1950 a défrayé la chronique.
- Violette Nozière, jeune fille accusée d’avoir tué son père dans les années 1930, dans un contexte familial lourd de silence et de violence.
Ces femmes n’ont pas agi dans un vide moral. Chacune de leurs histoires est ancrée dans un contexte social et personnel complexe, souvent marqué par l’oppression, les violences conjugales, ou encore l’impossibilité de fuir leur condition.
Une relecture féministe et judiciaire
L’un des apports majeurs du livre de Gérard Morel est sa volonté de comprendre, plutôt que de condamner. En tant que magistrat, il ne cherche pas à excuser, mais à contextualiser. Il remet en question la figure de l’empoisonneuse comme archétype du mal féminin.
À travers une analyse rigoureuse des archives judiciaires, Morel démontre que certaines de ces femmes ont pu être victimes de procès biaisés, de jugements fondés sur des croyances plutôt que sur des faits. Il interroge aussi la manière dont la société a façonné leur légende noire.
Une arme de pouvoir dans une société sans issue
Ce livre pousse à réfléchir : et si le poison n’était pas seulement un instrument de mort, mais aussi un outil de pouvoir ? Dans une société où les femmes n’avaient aucun recours légal, aucune indépendance économique, aucun droit au divorce, empoisonner devenait, pour certaines, un acte de révolte ou de survie.
Le poison, alors, n’est plus seulement une arme. Il devient le symbole d’un refus : refus de se soumettre, refus d’endurer, refus de disparaître sans laisser de trace.
Une légende noire au parfum de vérité
La force du livre de Gérard Morel réside aussi dans son style : empathique, accessible, mais toujours précis. Il sait raconter sans juger, tout en invitant le lecteur à questionner ses propres préjugés. Chaque portrait est un récit à part entière, entre polar historique et étude sociale.
Vous serez peut-être troublé par ces histoires. Peut-être même que certaines d’entre elles éveilleront une forme de compassion. Car derrière chaque « femme qui tue » se cache une femme qui souffre, une femme qui lutte, une femme qui veut vivre.
Conclusion : Et si nous révisions notre Histoire ?
Il est temps de regarder autrement ces figures longtemps considérées comme monstrueuses. Non pas pour les absoudre, mais pour mieux les comprendre. Car comprendre, c’est aussi apprendre à nommer l’injustice là où elle s’est jouée. C’est donner une voix à celles qu’on a trop souvent réduites au silence.
Le livre Ces femmes qui tuent n’est pas qu’un recueil de faits divers historiques. C’est une invitation à revisiter l’Histoire avec lucidité, humanité, et un soupçon de doute salutaire. Ce livre est disponible en ligne.
Titre : Ces femmes qui tuent – D’Agrippine à Marie Besnard, les grandes empoisonneuses de l’Histoire
Auteur : Gérard Morel
Nombre de pages : 260 pages
Date de parution : 27 février 2025
Editeur : L’Archipel
ISBN 978-2809849592
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Ces portraits vous ont-ils interpellé ? Pensez-vous que certaines de ces femmes mériteraient d’être réhabilitées ? Ou au contraire, estimez-vous que leur crime dépasse toute tentative de compréhension ?
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4 commentaires
Un titre qui sort des sentiers battus en abordant le thème des femmes empoisonneuses sous l’angle de la compréhension fine de leur histoire et de leur parcours.
C’est un angle que j’ai apprécié
On a envie de se plonger dans ce livre, et vite !
Bonne lecture.