Cinq ans après sa parution, Médecin de campagne, signé par Charles Lanot, est réédité aux Éditions Illador. À l’heure où la médecine est devenue avant tout affaire de spécialistes, c’est l’occasion pour de nouveaux lecteurs de découvrir cet ouvrage fort, qui met à l’honneur avec humour et passion le rôle empathique du médecin de campagne.
Médecin de campagne
De la médecine à la littérature
Avec Médecin de campagne, Charles Lanot s’inscrit dans la grande tradition française des médecins devenus écrivains, de Rabelais à Jean-Christophe Rufin ou Martin Winckler, en passant par Louis-Ferdinand Celine, Jean-Bernard ou Jean Reverzy. Avec l’âge, il est devenu conteur, et sa belle écriture montre que l’humanité peut exister, même dans un « monde de brutes ».
Son livre raconte ses consultations de médecin de campagne en Normandie. Avec humour, comme dans l’histoire intitulée « Le VCS » (Vieux Con Sympathique), il décrit une médecine qui n’a plus cours aujourd’hui, et qui était fondée sur le contact humain, la palpation et l’échange psychologique plus que sur la technique.
Un ouvrage primé
Le 18 septembre 2015, l’année suivant sa sortie, Médecin de campagne a obtenu le prix Jean-Bernard. Créé dans le cadre de la Journée du livre, le prix Jean-Bernard récompense une oeuvre littéraire dédiée à la médecine.
Il est décerné par un jury comprenant notamment des membres de l’Académie nationale de médecine et des membres de l’Académie française.
« Pour soigner les gens, il faut être poète. »
Charles Lanot
Extrait de Médecin de campagne
C’est l’histoire d’un vieux (enfin pas trop) médecin à qui la Sécu proposa une retraite anticipée. Il hésita. Il avait soixante ans. Soixante balais ? Du balai !
Il n’avait que soixante ans… C’était selon les jours !
Mais il avait encore bon pied bon œil. Les malades étaient satisfaits de ses services, et, s’il avait moins de science que ses confrères, il avait plus d’expérience, ceci compensant cela. Autour de lui la mode était à la spécialisation à outrance. Eux, ils soignaient le foie ou le coeur ou la peau ou les poumons, etc. Lui, il soignait les gens. Tous les gens. De tous âges, de toutes conditions : les petites gens, les bonnes gens, les gens du coin, de leur naissance jusqu’à leur mort, un médecin de famille, quoi ! Celui qui guérit parfois, qui soulage souvent, qui accompagne toujours. Et ça, il le faisait tout seul, modeste artisan dans son coin, toujours émerveillé devant ce miracle qu’est le colloque singulier de la relation médecin-malade : une conscience qui rencontre une confiance !
Et ça marchait ! Tant bien que mal…
Oui mais voilà ! Il avait l’impression d’être un des derniers représentants d’une espèce non protégée, en voie de disparition. Médecin généraliste, médecin de famille de surcroît, alors que l’avenir était à la spécialisation et que la famille était un concept dépassé, sans avenir.
Charles Lanot
Charles Lanot est né à Lattaquié, en Syrie, en 1929, l’année même où on découvrit le premier alphabet non loin de là, dans l’ancienne cité d’Ougarit : une coïncidence certes mais qui annonce peut-être le lien intime et privilégié qu’il entretiendra tout au long de sa vie avec les mots.
Fils d’une mère syrienne et d’un père français directeur d’un lycée français, Charles se dirige vers la médecine, et devient médecin généraliste à la campagne. Durant toute sa carrière, il exerce son métier de manière atypique.
Installé dans la petite commune de Mortrée, dans l’Orne, il fut un pionnier de la défense du droit à la contraception, puis à l’avortement, avant de prendre sa retraite en 1992. Aujourd’hui, il continue de militer et de défendre le « droit de mourir dans la dignité ».
8 commentaires
Exactement comme mon médecin !
Un des derniers pionniers qui n’a pas peur de prendre sa voiture et venir voir les patients à domicile.
C’est presque devenu un ami, on se tutoie et il me connait bien.
J’ai une entière confiance en lui : il a su prendre mon cancer à temps, sans tergiverser en analyses fastidieuse !
Pardon pour le hors sujet mais je note ce livre.
» Bon mardi et reprise du boulot, pour certains.
Toujours des matinées automnales … avec une peu de soleil l’après-midi.
On ne se croirait pas au mois de juin …
Gros bisoux ♥ «
Tu n’es pas hors sujet, c’est important la confiance en son médecin.
et bien dans mon coin, médecin de campagne ou généraliste sont devenus une denrée rare
ça devient un sacré problème, et du coup les urgences sont saturées.
J’avais lu ça, je le relirais volontiers !
Cette réédition est une vraie bonne idée
Ce genre de médecin, hélas, n’existe plus ! Trop de travail, trop d’heures passées auprès des patients et de leurs familles… un sacerdoce !
Le monde change…